
Sonia Bompastor : « Entraîner Ada Hegerberg ou Wendie Renard, c'est la même chose qu'entraîner Zidane ou Messi ! »

02/26/2025 09:30 AM
Vainqueur de la Ligue des Champions comme joueuse et entraîneure avec l'OL, Sonia Bompastor a pris les rênes de Chelsea cette saison. Dans "Une vie de foot", la Française se livre comme jamais sur son parcours et sa vie.
Vous avez connu beaucoup de premières dans le football féminin. Au début, les chaussures n'étaient par exemple pas adaptées à votre pointure… Quelle est la prochaine première ?
Dans le court terme, j’aimerais beaucoup décrocher la Ligue des Champions avec un autre pays ou un autre club que l'OL. C’est ce pourquoi on a décidé de tenter ce nouveau challenge à Chelsea. Etre capable aussi d’accompagner de la meilleure des manières mes enfants dans leur vie quotidienne. Pour l’instant, ça reste de jeunes enfants, ils vont devenir adolescents. Dans ma carrière professionnelle, je n'ai pas forcément de plan de carrière, on verra si des opportunités se présentent.
« Continuer à gagner ! C'est mon moteur et c’est pour ça que tous les matins je me lève. J'ai la haine de la défaite »
Pour le football féminin général, y a-t-il encore des bastions à conquérir ?
C’est évident. Le football féminin avance à différentes vitesses en fonction des pays, des envies, des volontés. Aujourd’hui, on vit une expérience très positive en Angleterre avec un football féminin qui a avancé dans la bonne direction, qui a su surfer sur la bonne vague après leur Euro réussi en termes de résultats et d'engouement populaire (vainqueur en Angleterre en 2022, Ndlr). Si on compare avec la France, on souffre de la comparaison et il y a des choses qu'il faudrait réussir à mettre en place ici. Mais, pour ça, on a besoin d’avoir des dirigeants qui y croient, on a besoin d’avoir des investisseurs aussi qui y croient et ce coup de pouce il faut qu’il arrive.
Au niveau des salaires, les choses se sont-elles améliorées ?
Sur le plan des salaires, je pense qu’en France certaines joueuses ont très certainement des salaires similaires à ce qui se fait dans d’autres pays, des salaires tout à fait convenables. Ce n'est peut-être pas l’une des priorités. L’économie dans le football féminin en est une. Le salaire des joueuses, même s’il y a toujours des améliorations à apporter, aujourd’hui, les meilleures footballeuses françaises ont plutôt des salaires convenables.
« Retrouver Lyon en finale de la Ligue des Champions, ce serait beau… »
Vous avez gagné la Ligue des Champions comme joueuse et coach. Que pouvez-vous faire de mieux ?
Continuer à gagner ! C'est mon moteur et c’est pour ça que tous les matins je me lève. Je suis quelqu’un qui a la haine de la défaite. Même si on fait un très bon parcours en termes de résultats depuis le début de la saison, en termes de titres, on n'a encore rien gagné. On arrive dans le moment décisif de la saison, c’est là où il faut répondre présent. Continuer à gagner, c’est ce qui motive.
En quarts, ça devrait passer contre Manchester City. Ensuite, en demi, ce sera Barcelone ou Wolfsburg. Rêvez-vous de retrouver Lyon en finale de la Ligue des Champions ?
Ce serait beau, ce serait symbolique. Le parcours va être difficile parce que Manchester City reste une très belle équipe et surtout on va devoir les affronter quatre fois en l’espace de dix jours, ce qui n’est pas commun. Ça restera une première étape à franchir. Mais, effectivement, la perspective de pouvoir éventuellement jouer Lyon en finale à Lisbonne, ce serait symbolique et super.
Avez-vous déjà abordé le sujet avec vos anciennes joueuses ou avec Jean-Michel Aulas ?
Non. Chacun est concentré sur ses propres objectifs.
Gagner la Ligue des Champions dès votre première année à la tête de Chelsea cela n'arriverait-il pas trop vite ?
Ce n'est jamais trop vite ! (sourire) Si ça peut être dès cette année, on sera ravi.
En arrivant à Chelsea, vous n'avez pas pris de joueuses de l'OL. Etait-ce par choix ?
Il y avait une volonté de ne pas prendre des joueuses de l’Olympique Lyonnais par respect pour le club. Même si c’était certainement le bon timing pour moi de partir et de rejoindre un autre projet, j’ai beaucoup de respect pour le club, ça reste mon club de cœur. Mais il ne faut jamais dire jamais (sourire). En tout cas, ce ne sera jamais avec une volonté de déstabiliser un concurrent direct, juste parce que, à un certain moment, comme je le disais, il y a des bonnes joueuses dans ces clubs-là. Et peut-être que ces joueuses peuvent permettre à Chelsea de gagner des titres.
A l'OL, il y avait la pression de gagner la Ligue des Champions chaque année. Est-ce différent à Chelsea ?
La pression du résultat, elle est là. Par contre, on sent beaucoup de bienveillance. Chelsea est un club qui a déjà beaucoup gagné sous l'ère Emma Hayes, beaucoup de titres sur le plan national. Maintenant, ils affichent leur ambition de vouloir gagner la Ligue des Champions, mais il n'y a pas de timing. Bien évidemment, si on arrive à le faire dès cette saison, ce serait magnifique. Mais ils nous laissent du temps. On a un contrat de quatre ans et l’idée c’est de pouvoir construire les choses pour se donner beaucoup de chance.
Dans votre carrière, vous gagnez souvent la première année…
Oui, si on se réfère à mon expérience, mais ce sera dur. Ce qui est agréable, même si les résultats sont positifs pour l’instant, on ne sent pas de pression par rapport à cet objectif majeur.
Des choses vous ont-elles surpris qui vous font dire qu’aujourd’hui Chelsea est en avance sur Lyon ?
Il y a beaucoup de similitudes entre les deux clubs. Ce sont des environnements de très, très haut niveau. A Chelsea, on sent qu’il y a un petit peu moins d’expérience par rapport au palmarès et notamment le fait d’avoir gagné la Ligue des Champions. Maintenant, ça reste un club très puissant avec tout ce qu’il faut pour atteindre des objectifs très élevés.
« Chelsea a une vision commune à toutes ses équipes. Ils veulent construire UN club »
Avez-vous des discussions avec le coach des garçons Enzo Maresca ?
Ce qui est intéressant, c’est qu'on est tous sur le même centre d’entraînement, un très grand centre. Il y a 32 terrains ! C’est vraiment gigantesque. Centres de formation garçons et filles. Equipes pros garçons et filles. Chacun travaille en autonomie mais, en même temps, il y a pas mal de passerelles. Déjà dans le projet, avec les nouveaux investisseurs, les nouveaux propriétaires, les directeurs sportifs, il y a une vision qu'ils veulent commune à toutes les équipes. C’est très intéressant. J’ai déjà eu des temps d'échanges avec Enzo Maresca, avec Filipe (Coelho) qui est l'entraîneur de la réserve masculine. Ils ont vraiment la volonté de construire UN club.
Même dans la façon de jouer ?
Ils ont changé cet été l’entraîneur chez les filles, chez les garçons et aussi de l’équipe réserve masculine. Ils ont pris des entraîneurs qui avaient une philosophie basée sur le beau jeu, avec de la possession. Après, on essaie chacun d'apporter ses idées ou ses grands principes au niveau de nos équipes respectives.
Quand vous êtes arrivée à la tête de l'OL en tant qu'entraîneure, certaines joueuses auraient préféré un homme ! Aujourd’hui, est-ce encore compliqué d’être une femme, d’entraîner des femmes ?
Ça a évolué. Après, la plupart des athlètes et j’en faisais partie moi aussi, nos figures emblématiques ce n’étaient que des hommes. Ces figures emblématiques féminines, on ne les avait pas, dans la société, dans le sport et donc dans le football féminin. On a grandi et on a été éduqué comme ça. Moi-même, à un moment donné, j’ai plutôt apprécié être entraînée par des hommes plutôt que des femmes. Mais je pense qu’avec l’évolution, on a maintenant de plus en plus de figures et d’athlètes féminines qui montrent qu'on peut avoir de la compétence au plus haut niveau.
Un entraîneur masculin était-il plus crédible ?
Au plus haut niveau, en termes d’expérience, il y avait quand même plus d’hommes à des postes à responsabilités. Pour une femme qui arrivait au plus haut niveau, et ça a été mon cas, je suis passée du centre de formation de l’Olympique Lyonnais à directement l’équipe professionnelle. Certaines personnes ont pu penser que je manquais d’expérience. Dans mon parcours, je n’avais pas eu l’opportunité de pouvoir coacher une équipe au très, très haut niveau avant celle de l'OL. Ce manque d’expérience fait que plus souvent vous avez plus de visibilité envers un homme qui a eu plutôt et plus souvent dans sa carrière l’opportunité et l’expérience au très haut niveau.
« A l’Olympique Lyonnais, on m’a posé la question : « Si le poste des garçons se libère, est-ce quelque chose qui pourrait t’intéresser ? » »
Entraîner des hommes, est-ce une envie ?
On ne me l'a pas proposé concrètement, mais il y a déjà eu des discussions, même au sein de l’Olympique Lyonnais. On m’a posé la question : « Si le poste des garçons se libère, est-ce quelque chose qui pourrait t’intéresser ? » Pas forcément, mais c’est marrant parce que quand on me pose cette question, souvent ce que je renvoie aux journalistes qui me la posent, c’est : « Est-ce que pour vous, quand vous me posez la question, vous pensez que d’entraîner les hommes c’est mieux que d’entraîner une équipe féminine ? »
Médiatiquement, c'est une plus grande reconnaissance.
Ce n’est pas mon moteur d’être dans la lumière et en avant médiatiquement, ce n’est pas ce qui m’intéresse…
… Même d'avoir les meilleurs joueurs du monde ?
Quand on entraîne les meilleures joueuses du monde, c’est pareil pour moi parce que finalement ils fonctionnent de la même manière. Quand vous entraînez une Ada Hegerberg ou une Wendie Renard, c’est la même chose qu’un Zidane ou qu'un Messi ! Il y a certainement des sensibilités différentes, mais, par contre, l’ego, les qualités, ce sont les mêmes. Dans le management, que vous entraîniez Zidane, Messi ou Renard ou Hergerberg, vous avez les mêmes codes et la même manière de faire. Aujourd’hui, si c’est pour aller chez les garçons et avoir un peu plus de visibilité et de lumière médiatique, ce n’est pas mon moteur, ce n’est pas ma volonté. Je suis très bien au plus haut niveau féminin.
Vous ne dites quand même pas non…
Je ne ferme pas la porte, mais ce n’est pas ce que je recherche.
Comme Zidane, vous avez gagné en tant que joueuse et entraîneure la Ligue des Champions. La comparaison vous flatte-t-elle ?
C’est un joueur que j’ai énormément apprécié et quelqu’un qui a dégagé une image très positive pour les Français. Donc c’est flatteur. J’ai eu la chance de passer des diplômes d’entraîneur avec lui. C’était une expérience super enrichissante. Mais, toutes proportions gardées, c’est difficile pour moi de me dire que je suis sur le même pied d’égalité. Ça reste quand même deux milieux différents.
« Après Hervé Renard, il y a eu quelques discussions mais, aujourd’hui, je me sens plus en phase avec le métier d’entraîneur en club »
Lui rêve ouvertement d'entraîner l'équipe de France. Et vous ?
Pourquoi pas un jour. Aujourd’hui, je suis à Chelsea et je m’y sens très, très bien. Maintenant, je n’ai pas de plan de carrière. Mais si ça se présente et que c'est dans un bon timing pourquoi pas.
Ne vous a-t-on pas sondée après le départ d'Hervé Renard ?
Il y a eu quelques discussions, mais c’était très clair dans ma tête. Aujourd’hui, je me sens plus en phase avec le métier d’entraîneur en club. Le métier de sélectionneur est différent de celui d’entraîner au quotidien dans un club. Et Chelsea, c’était une suite logique de l'OL.
Après Hervé Renard, c'est encore un homme (Laurent Bonadei) qui a pris les rênes des Bleues…
Des profils féminins existent. Sandrine Soubeyrand en faisait partie. Sonia Haziraj qui est à la tête du centre de formation du Paris Saint-Germain féminin aussi. Après, ce sont des choix. Laurent Bonadei est aussi un très bon candidat. Ça se respecte. Certainement que les profils féminins qui pouvaient remplir les cases pour devenir sélectionneure n’étaient peut-être pas disponibles ou sur la même longueur d’onde à ce moment-là.
Avez-vous été surprise qu'un club comme Chelsea vous approche ?
Une fois que vous avez coaché l'OL, dans votre CV, ça ouvre pas mal de portes. La volonté de Chelsea, c’était, à même niveau de compétences, d’avoir une femme et, du coup, forcément, quand vous cherchez une femme qui a déjà eu l’expérience dans un club de très, très haut niveau, il n'y en a pas 50. A travers le monde, il y a une dizaine de profils. En termes de disponibilités, ça se réduit à une liste de trois ou quatre et, sur ces trois ou quatre, je faisais partie des priorités.
Aviez-vous d’autres possibilités à part Chelsea ?
Oui, il me restait de toute façon un an de contrat à Lyon donc j’aurais pu aussi très bien terminer ma dernière année de contrat. Mais comme je l’ai dit, je pense que c’était le bon moment pour partir.
« On souffre en France d’un championnat qui est peu compétitif »
Lyon est toujours là, mais on sent que le foot français a été dépassé par d’autres clubs en Europe. S'est-on trop reposé sur nos acquis ?
L'OL a fait ce qu’il fallait et continue de faire ce qu’il faut. C’est la vraie locomotive du football féminin français. Aujourd’hui, ce qui manque, c’est d’avoir justement d’autres clubs qui embrayent le pas de l'OL et qui puissent venir appuyer sur l’accélérateur pour développer la discipline. On souffre en France d’un championnat qui est peu compétitif. Les gens sont aussi un peu lassés de voir que l’Olympique Lyonnais gagne toujours. Il y a un manque d’intérêt. Il y a aussi un manque de courage au niveau des investisseurs. On demande d’investir beaucoup d’argent dans un contexte qui n'est pas forcément favorable. Des pays comme l’Angleterre, l'Espagne, l’Allemagne ou l’Italie ont réussi à y croire et à investir et à avancer dans la bonne direction. On parlait de l’Angleterre avec le fait d’avoir surfé après l’Euro 2022 sur les bons résultats de son équipe nationale. Après la Coupe du Monde 2019, on a loupé un virage. Les instances du football français ont loupé un virage, les clubs ont loupé un virage. On sent qu'il n'y a pas cette envie d'avancer dans la bonne direction. C’est compliqué, mais il faut y croire. Il y a eu une prise de conscience depuis deux ou trois saisons. On avance plutôt dans la bonne direction, il faut essayer d’y aller le plus vite possible. Forcément, ce retard a été pris et maintenant il faut essayer de le combler.
« Le PSG a une vision année après année, mais pas sur du long terme. On ne voit pas trop de clarté dans leur projet »
Le PSG devait lui marcher dans les pas de l'OL et on est loin du compte…
C’est décevant de la part du PSG. On ne voit pas trop de clarté dans leur projet. C’est un club qui, la saison dernière, arrivait encore à titiller l’Olympique Lyonnais. Cette saison, quand on voit les matchs entre l'OL et le PSG, il n'y a pas photo ! Il y a une classe d’écart. Le PSG a une vision année après année, mais pas sur du long terme. Chaque année, ils perdent leurs meilleures joueuses. Dans ces conditions, c’est difficile de rester au niveau de l'OL.
A l'image du football féminin français, l'équipe de France ne gagne pas. Là aussi, c'est symptomatique.
On avait placé beaucoup d’espoirs en Hervé Renard, de manière tout à fait légitime parce que c’est quelqu’un qui avait déjà gagné, qui avait beaucoup d’expérience et qui aurait certainement pu ou dû apporter quelque chose à cette équipe. Il a énormément essayé, il a été très humble à la fin de son expérience en disant que lui aussi n’avait pas réussi. Ça veut dire qu'il manque quelque chose. Il manque certainement sur l’aspect mental, encore plus de détermination dans les moments cruciaux d’une grande compétition. Etre plus efficace. Il manque aussi un peu plus de travail dans la mentalité pour qu'on puisse enfin réussir à gagner un titre.
A l’image des Belges chez les garçons, l'équipe de France féminine n'a-t-elle pas raté le coche ?
Il y a eu de belles générations qui auraient pu avoir les moyens de gagner. C'est un regret. On n'était pas loin à chaque fois. Aujourd’hui, il faut se retrancher dans le travail, s’acharner à trouver des solutions pour pouvoir y arriver, parce qu'encore une fois il y a des éléments pour réussir.
Dans le livre, vous n'êtes pas tendre avec l'ancien sélectionneur Bruno Bini (2007-2013). Pensez-vous que si ça avait été un autre coach vous auriez gagné un titre avec l’équipe de France ?
Si, à un moment donné, on a un coach plus tacticien, plus soucieux du détail, je pense qu'on aurait gagné un titre. Il y avait de très belles générations. L’Olympique Lyonnais, quand on gagne en 2011 et 2012 la Ligue des Champions, l’ossature de l’équipe de France, c’est l’Olympique Lyonnais. On avait une étrangère par ligne qui venait apporter encore plus de performances à l’équipe. Mais je pense qu’il y avait tout à fait le potentiel et le talent pour gagner des titres en 2011 et 2012 avec l'équipe de France. Si on a à ce moment-là un Patrice Lair ou un Gérard Prêcheur à la tête de l’équipe, on a plus de chances de gagner.
Il ne vous a plus rappelée après votre 156ème sélection. La cicatrice est-elle aujourd'hui refermée ?
Elle est refermée parce que je suis quelqu’un qui ne suis pas rancunière et j’avance dans la vie. J’ai eu dans mon parcours pas mal de barrières ou de difficultés que j'ai toujours su briser ou faire faire avancer sans en tenir rigueur à qui que ce soit. Pour Bruno, c’est la même chose. Pour être transparente, on échange encore quelques messages…
« Jean-Michel Aulas ferait certainement un bon maire de Lyon »
Jean-Michel Aulas ferait-il un bon maire de Lyon ?
Pourquoi pas ! (sourire) J'ai lu qu'il était tenté. Ça lui correspondrait bien.
Voteriez-vous pour lui ?
Certainement. Après, il faut voir ses idées et quel parti. Mais c’est possible. De ce que je connais de l’homme, il ferait certainement avancer les choses encore une fois sur la condition de la femme.
Dans le livre, vous révélez être en couple avec votre ancienne coéquipière et aujourd'hui coach-assistante Camille Abily. N'avez-vous pas peur que la presse anglaise connue pour son côté people en fasse ses choux gras ?
Ils n'ont pas encore trop d’informations sur la sortie du livre. J’en ai parlé plus de manière interne au club. Après, ils ont une ouverture d’esprit qui est quand même plus importante que ce que nous on a en France. Peut-être pas dans toute l’Angleterre, mais en tout cas à Londres. Je le vois au quotidien. Ils sont moins dans le jugement. Il y a beaucoup moins de stress si on compare Londres et Paris. Londres est une ville qui est très étalée, on n’est pas les uns sur les autres, il y a beaucoup de parcs et ce contexte fait que les gens ont plutôt un bien-être et un bien vivre qui est agréable. Quand j'emmène mes enfants à l’école le matin, les gens promènent leur chien en pyjama, vont faire leurs courses en pyjama. Ils ont des looks qui peuvent être complètement différents les uns des autres et ça ne pose de problèmes à personne.
La presse, c'est autre chose…
Vous avez raison, mais je pense que comme c’est le cas aujourd’hui, et j’espère que ça durera le plus longtemps possible, quand vous avez des résultats ils savent aussi vous ficher la paix. Le livre vient de sortir, mais je ne suis pas inquiète. Ils sauront respecter ma vie privée.
« C’est certainement plus facile pour deux femmes d’annoncer leur homosexualité que pour deux hommes, et pas que dans le sport »
Pour vous, ça a été compliqué de reconnaître votre homosexualité et de le dire. Est-ce encore un tabou dans le football ? On a du mal à imaginer un entraîneur homme en couple avec son assistant faire son coming-out…
C’est certainement plus facile pour deux femmes d’annoncer leur homosexualité que pour deux hommes, et pas que dans le sport, mais aussi dans la société. Après, à partir du moment où je me livrais, je ne pouvais pas ne pas évoquer ce chapitre de ma vie. Ce n’est pas forcément un sujet tabou dans le football, en tout cas pas dans le football féminin. La société a évolué. C’est plus simple d’en parler aujourd’hui, mais ça reste un sujet où il y a encore la peur du jugement des autres.
« Corinne Diacre n'a rien gagné, mais les entraîneurs qui lui ont succédé pas plus qu'elle »
Vous avez connu Corinne Diacre en tant que joueuse. A-t-on été trop sévère avec elle suite à son passage comme sélectionneuse de l'équipe de France (de 2017 à 2023, Ndlr)
C’est quelqu’un que je connais bien, pour qui j’ai beaucoup de respect et d’admiration parce que je connais à la fois son parcours de vie et les différentes expériences qu’elle a pu avoir dans le football en tant que joueuse, mais aussi en tant qu'entraîneure. En tant que femme, elle a brisé des barrières, elle a été la première à entraîner dans le football masculin (Clermont de 2014 à 2017, Ndlr). J'ai beaucoup de respect pour l’ensemble de sa carrière, pour la femme qu’elle est, forcément très solidaire de de ce qui s’est passé, même si elle n'a peut-être pas été complètement irréprochable à certains moments. En tout cas, la manière dont elle a souffert et tout ce qui s’est passé, ça a été difficile pour elle à vivre. Je lui souhaite le meilleur.
C'est elle qui a endossé tous les échecs de l'équipe de France…
Quand vous regardez en termes de résultats, c’est quelqu’un qui, finalement, a eu de bons résultats. Elle n'a rien gagné, mais les entraîneurs qui lui ont succédé pas plus qu’elle. C'étaient plus des problèmes relationnels et de management qui aujourd’hui sont très importants au très haut niveau. Les joueuses ont du pouvoir et quand elles expriment certaines choses, elles peuvent être écoutées. C’est toujours plus facile pour un dirigeant de changer un entraîneur plutôt qu’un groupe de 25 joueuses. C’est aussi parfois la solution de facilité.
Avez-vous de ses nouvelles ?
Je l’ai recroisée une ou deux fois après son éviction de l’équipe de France. Forcément, elle a été très marquée par ce qu’il s’est passé. Elle a besoin de se reconstruire et de trouver de nouveaux défis et challenges.
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